Road trip dans les Westfjords islandais

À la Croisée des Fjords et des Vents

Après l’arrêt brutal de notre trek dans les Highlands suite à l’arrivé d’une grosse tempête, nous n’avions qu’une idée en tête: partir en road trip dans les westfjords pour découvrir une autre facette de ce pays extraordinaire. Nous voulions encore un temps profiter de la solitude et voir ce que la côte islandaise avait à nous offrir. Naturellement, nous nous sommes dirigés vers les fjords situés au nord-ouest du pays et sur la péninsule de Snæfellsnes. Dans cet article vous découvrirez notre itinéraire complet ainsi que nos coups de cœur et petits trips, pour vous aider à planifier votre voyage à travers des paysages sauvages de l’Islande.

POURQUOI LES FJÖRD DU NORD-OUEST ?

Les fjords de l’ouest ou plus communément appelés Westfjords sont la partie de l’Islande la moins peuplée, mais également la moins touristique. C’est une région réputée rude par son climat où les hauteurs sont recouvertes de neige une grande partie de l’année. Ajoutez à cela des routes de terres cahoteuses qui longent la côte sur des falaises abruptes, il n’en faut pas moins pour se croire au bout du monde. Loin de toute civilisation, cette région est un agrégat de tout ce que l’Islande a de plus beau à offrir. Sa faune rare, ses fjords iconiques, sa lumière indomptable, cette beauté sauvage doit néanmoins savoir se mériter. Sa situation géographique à l’extrême nord-ouest du pays et le kilométrage peut parfois un peu effrayer des voyageurs. En toute transparence, ce temps passé en voiture est largement comblé par les incroyables paysages. Laissez-vous tenter par cette route brute et solitaire aux confins de l’Islande. Vous ne serez pas déçu !

— Les essentiels pour un road trip en Islande

▸Les différents types de route

Avant tout, il faut savoir que seulement  30% des routes sont goudronnées sur le territoire islandais. Avec 70% de pistes gravillonnées et/ou de terre, cette donnée est absolument à prendre en compte dans la construction de votre itinéraire. La classification des routes est simple:

 Un seul chiffre: La route n°1 (il n’en existe qu’une !) est l’axe de circulation principal en Islande. Entièrement goudronné et très bien entretenu, il fait le tour complet de l’île. 

↠ Deux chiffres:  Ils indiquent les autres grands axes routiers sur lequel il est aise de conduire (souvent goudronnés ou recouvert de gravillons)

↠ Trois chiffres: Ces routes secondaires de l’île sont la plupart du temps recouvertes de gravillons ou faites uniquement de terre.

Cette classification est indicative, car n’indique pas les dégradations sur l’itinéraire. Il est donc important de se renseigner sur le site officiel des routes islandaises road.is qui renseigne en temps réel, l’état des routes. On peut également y trouver une carte classifiant les routes goudronnées ou non.

Routes « F »: il s’agit de pistes de terres nécessitant un véhicule de type 4×4. Elles se trouvent principalement dans les Highlands au centre de l’île, mais également sur les côtes de certaines fjords. Ces pistes peuvent parfois être praticables pour des 4×4 citadines classiques, mais la plupart du temps, il est nécessaire d’avoir un véhicule tout-terrain (châssis haut, pneu adapté, etc.) et une conduite sûre. Voici une carte des F roads en Islande. Le choix du véhicule est donc important, mais sa bonne maitrise est primordiale !

La traversée des gués n’est pas à prendre à la légère. Elle peut s’avérer très dangereuse suivant les conditions. Voici une carte indiquant la profondeur et le niveau difficulté. La météo capricieuse de l’Islande influence énormément le trafic routier. D’un jour sur l’autre, une route peut être coupée par l’eau. Prenez donc le temps de vous renseigner en amont mais également le jour J. 

▸ Quelle voiture choisir pour un road trip en Islande ?

Maintenant que vous avez identifié vos envies et votre itinéraire, vous pouvez vous pencher sur la question: « Quelle catégorie de véhicule vais-je choisir ? » Pour notre road trip, nous avons opté pour une citadine avec 4 roues motrices. Ce choix fut motivé par son prix attractif et l’urgence de notre situation. Néanmoins, après avoir parcouru une grande partie des Westfjords, nous ne pouvons que vous conseiller de louer un véritable 4×4. Cela vous permettra de sillonner la majorité des pistes du pays (dont certaines pistes classées F) sans vous poser de questions. Bien sûr, si vous prévoyez de ne rouler que sur la route 1, le 4×4 n’est pas nécessaire ! À l’inverse, si vous envisagez de sortir des sentiers battus et d’explorer les côtes profondes de l’île alors n’hésitez pas, le 4×4 est essentiel.

▸Quelques règles pour conduire en toute sécurité en Islande

↠ Sur les routes principales, la limitation est fixée à 90km/h. Elle est autorisée jusqu’à 80km/h sur les pistes gravillonnées bien que la vitesse moyenne sur ces axes ne dépasse pas souvent les 50km/h. Autant pour admirer le paysage que pour ne pas faire une sortie de route !

↠ Il est obligatoire de rouler avec les feux allumés de jour comme de nuit.

↠ Il est totalement illégal de rouler en dehors des pistes (même dans le centre du pays). Si vous vous faites prendre ou dépanner hors de la route, je vous souhaite bon courage !)

↠ Les réservoirs essence des voitures en Islande sont plus petits qu’en Europe. Pensez donc à faire le plein de réservoir dès que vous le pouvez !  Même si les stations sont bien réparties dans le pays, elles sont parfois très éloignées de plus de  100km les unes des autres. 

 ↠ L’état des routes évolue très vite la saison ou les intempéries journalières ! Il est donc nécessaire de renseigner sur la praticabilité des pistes sur le site road.is.

↠ Une chose très importante (et qu’on ne dit pas assez): les moutons sont la plupart du temps en totale liberté et peuvent parfois se trouver sur la route. Ne vous y trompez pas ! Vous êtes chez eux et ils ne se pousseront pas de la route en voyant une voiture arriver. Ils se déplacent souvent par groupe de trois individus. Alors, si vous n’en voyez que deux, un troisième peut débouler à tout moment du bas-côté.

↠ Utilisez les emplacements dédiés pour vous arrêter au bord de la route. Cela peut paraitre anodin, mais en Islande, le paysage est si beau, que vous serez tenté de vous arrêter n’importe où « juste pour prendre une petite photo ». C’est dangereux et très pénible pour les autres voitures.

Jour 1

— Direction la mythique route 643

Pour ce premier jour de road trip, nous voyons les choses en grand. L’objectif était de rejoindre la grande péninsule de Westfjords à l’extrême nord-ouest de l’Islande et de parcourir la mythique route 643. Délaissée par les touristes, cette voie longe la côte jusqu’aux thermes de Krossneslaug (ou la piscine du bout du monde). La perspective d’un itinéraire sauvage et aux panoramas époustouflants.

Il est temps pour nous dire quitter Reykjavik où nous avons passé un court mais instance séjour. Retrouvez un article complet de notre découverte de la capitale islandaise. Après avoir récupéré notre voiture chez Europcar, nous prenons la route 1 en direction du Nord. Très vite, nous quittons la banlieue de Reykjavik pour rejoindre les plaines du comté de Mýrasýsla. La route longe quelques montagnes. Ces dernières sont recouvertes d’une fine couche de neige due à la tempête de la veille.

Cratère de Grábrók

Rapidement, nous faisons un premier arrêt au cratère de Grábrók. Ce site naturel protégé est très accessible grâce à l’aménagement de pilotis qui guide le visiteur et l’empêche de se balader partout. Trois itinéraires sont proposés pour visiter les trois cônes volcaniques qui composent le site. Haut de 170m., le Stora Grábrók offre une vue panoramique sur les plaines environnantes. Un premier aperçu de ce road trip. Une petite heure suffit amplement pour découvrir l’ensemble du site.

La côte sauvage de la route 68

Dès nos premiers kilomètres sur la route 68, nous comprenons que le road trip commence. Les voitures se font de plus rares et les villages ne comptent maintenant qu’une ou deux maisons. Et encore mieux, nous atteignons la mer ! Quel bonheur de voir ces vagues qui se déchaînent. Nous remarquons également la concentration d’oiseaux autour des rivages. Un contraste frappant après les plaines désertiques du centre du pays. Nous longeons le Hrútafjörður. En vérité, nous nous arrêtons toutes les cinq minutes pour admirer les vues, prendre en photos ces petites églises de tôle colorée et respirer à plein poumon cet air iodé. Même après plusieurs heures de route, le mélange d’excitation et de joie ne nous quitte pas. Dernier arrêt essence et supermarché à Hólmavík avant d’emprunter la 643.

Ne faites pas l’erreur !

Ce n’est pas le moment de faire le coup de la panne. Les routes sont longues et les stations rares dans certaines parties du pays ! Un conseil, si vous êtes à la moitié de votre jauge, recharger ! Les réservoirs d’essence en Islande ont une capacité de 500 à 600 km d’autonomie (presque deux fois moins qu’en Europe).

La route 643 — Dépasser le 66° parallèle

Considérée comme la partie la plus désertique des fjords de l’Ouest, cette région est également un haut lieu de la sorcellerie islandaise où de nombreux mythes ont vu le jour. [Arrêt au musée de la sorcellerie ?] Enfin, nous atteignons la voie 643. Cette route de terre sillonne la côte du Strandir sur une centaine de kilomètres. Bien que non goudronnée, elle est accessible au véhicule de loisir classique. Tranchée et nid de poule sont à prévoir, mais le 4×4 n’est à priori pas nécessaire. La route 643 est unique ! Autant par le fait que celle-ci soit un cul-de-sac que par les paysages qu’elle traverse.

Peu de mots peuvent exprimer tant de beauté alors je vous conseille d’aller voir par vous-même. Face à vous, une succession de montagnes enneigées, aux plaines chatoyantes bordées d’une mer noire et déchainée. Cette route au-delà du 66° parallèle est un délice pour les yeux et l’âme. Lorsque vous longez le rivage, soyez attentif aux formes des rochers qui émergent de l’eau. Vous remarquerez parfois une tête tachetée surmontée de deux petits ronds noirs et brillants. Les phoques se prélassent souvent au soleil, couché sur le dos et la queue en l’air. Cette partie de l’Islande en compte un certain nombre. Peu farouches, ils vous regarderont passer les nageoires posées sur le ventre. 

Aparté culturel au bout du monde

Si vous avez le temps, n’hésitez pas à faire un arrêt au Old Heritage Factory. Cette ancienne usine de hareng accueille une très belle exposition. Photographie, textiles ou sculptures, jamais l’art n’est allé si loin (à Djúpavík) !

Coucher de soleil au bout du monde

Vers 18h, nous atteignons Gjögur. Le jour décroit et emplit l’atmosphère d’une lumière ocre. Les milliers de petites gouttes d’humidité se gorgent des derniers rayons soleil et enflamment les montagnes environnantes. On ne peut voir cet éclat nul par ailleurs. Nous nous arrêtons au bout de ce chemin cahoteux, face à la mer (près de Krossneslaug). Notre petite voiture aux 4 roues motrices tient le coup ! Nous passons donc notre première nuit dans cette boîte de fer, fatigué, mais comblé de cette journée.

Contempler les aurores boréales

Admirer des aurores boréales est sans doute l’un des must have en Islande !

Nous avons eu cette chance cette nuit-là. Vers 22h, à moitié endormi dans notre couchage de fortune, Antoine a aperçu le premier des traînées blanches bouger dans le ciel. C’est un spectacle indescriptible. Peu à peu, ses nuages laiteux se sont transformés en une succession de flammes dansantes. Cette féérie s’est prolongée pendant 30 minutes. Nous étions bouche bée. Nos yeux infantiles croyaient cette nuit en la magie. Nous attendions depuis un moment de pouvoir admirer ce phénomène incroyable.

Un très bon article des Oiseaux Voyageurs permet d’en connaître davantage sur les aurores boréales et surtout d’apprendre à les photographier ! N’hésitez pas à y faire un tour !

▸Qu'est-ce qu'une aurore boréale ?

Concrètement, les aurores boréales sont des nuages de particules chargées électriquement qui pénètrent dans la haute atmosphère terrestre à très grande vitesse. Cela crée des voiles colorée, dans le ciel nocturne pouvant prendre des teintes vertes le plus souvent, mais également bleu, voire même rose. Pour l’hémisphère Sud, on parle d’aurore australe

▸Où et quand voir des aurores boréales ?

Les aurores boréales sont particulièrement fréquentes au-dessus du cercle polaire (66°33’N). Le Westfjord islandais est donc un terrain de chasse idéale. 

De plus, ce phénomène est plus intense (donc identifiable) dans l’obscurité. Ainsi, on dit généralement que celles-ci sont visibles en Islande, entre début septembre et mi-avril.

▸Quels sont les outils pour détecter les aurores boréales

 Light pollution Map : Ce site vous permette de trouver une zone loin de toute pollution lumineuse (en Islande, mais également dans toute l’Europe).

↠ Le site Space Weather Live ou l’application My Aurora Forecast indiquent les prévisions  pour les prochains sur l’emplacement et l’intensité des aurores.

Jour 2

— les baleines, le renard polaire et l'aventureuse route 622

La journée d’hier nous avait comblés, mais ce n’était que le début. Notre périple du jour nous conduirait jusqu’au bout de la route 622 et de son phare. Et rien ne présageait que nous allions y rencontrer deux des animaux les plus iconiques de l’Islande.

Un lever de soleil enflammé

Après un lever de soleil des meilleurs augures, nous débutons cette journée en rebroussant la route 643. Redondant ? En aucun cas, car les couleurs changeantes, du crépuscule et de l’aube modifient le paysage. Les détails qui nous ont échappé à l’aller se révèlent au retour.

L'ivresse de la route des fjords de l'ouest

À l’approche d’Hólmavík, nous rattrapons une voie goudronnée et prenons la direction d’Ísafjörður. La route 61 traverse les plaines du grand fjord du glacier de Drangajökull et rejoint le fjord d’Ísafjarðardjúp. Sur 120 kilomètres, celui-ci se découpe en des dizaines de bras que la route épouse un à un. Nous ne perdons pas une miette des paysages qui défilent. Les montagnes sont des murs merveilleux et immenses qui semblent avoir surgi de la mer. Leurs sommets blanchis par l’hiver contrastent avec leurs parterres cuivrés et leurs roches anthracites.

Nous nous arrêtons régulièrement pour tenter de capturer quelques clichés de ce spectacle. Peu après midi, Antoine devine au loin de petites formes groupées dans l’eau. Des phoques ? Non, nous en avons croisé un bon nombre et si leur compagnie est très sympathique, les spécimens que nous voyons là ont l’air plus gros. Il nous faut peu de temps pour comprendre qu’il s’agit d’un banc baleines. Elles sont loin, mais nous pouvons compter deux groupes de 6 individus. Quelle chance inouïe ! Même à plusieurs centaines de mètres, nous distinguons leurs jets puissants, ainsi que leurs dos et leurs immenses queues. Elles apparaissent et disparaissent dans l’eau avec la douceur d’une écume.

C’est rempli de ce bonheur simple que nous reprenons la route. Après un rapide arrêt à la station-service et au supermarché d’Ísafjörður, nous empruntons un profond et interminable tunnel (à double croisement !). Nous poursuivons sur la route 60 et atteignons le village de Þingeyri située en bordure du fjord Dyrajörður où nous quittons une nouvelle fois le goudron pour la terre.

Un peu d’histoire

Ne perdez pas l’occasion de vous arrêter visiter cet ancien hangar de séchage de poisson. Situé proche d’Vatnsfjörður (qui abrite également une petite église), ce bâtiment est un bel exemple d’architecture végétale, typiquement islandaise. Ne soyez néanmoins pas surpris par l’aspect délaissé de ce lieu. 

La route 622 — une piste sauvage et isolé

*Avant de vous engager sur la route 622. Seule la première section de la voie est praticable pour une citadine avec 4 roues motrices au minimum. À partir du phare de Svalvogar, il est nécessaire de rouler en 4×4. La 622 est une voie aérienne et étroite. La maîtrise totale de son véhicule est essentielle. Elle se trouve également en flanc de falaise et est donc sujette à des éboulements réguliers. Cette piste n’est pas à prendre à la légère.

Nous roulons doucement, car la piste est étroite et sinueuse. À flanc de falaise, ce chemin offre des vues imprenables sur les fjords. Chaque virage est une découverte. C’est à l’un de ces angles que nous avons pu apercevoir durant quelques secondes, le seul mammifère natif de l’île: le renard arctique. Couché sur le bord du chemin, nous l’avons surprise en pleine sieste. D’un bon, il s’est levé à rejoindre le bout de la piste, s’est arrêté pour nous regarder, puis à rebrousser son chemin pour disparaître dans les pentes descendantes de la falaise. Nous sommes restés béats de cette apparition. Nous savions que la région abritait un grand nombre de renards polaires, mais jamais nous n’aurions pensé en voir un. Quelle chance nous avons eue ! 

Si vous souhaitez en savoir un peu plus sur ces melrakki, n’hésitez pas à faire un arrêt au Arctic Fox Center de Súðavík. Il est ouvert du 15 mai au 30 septembre. 

Une nuit au son de l'océan Arctique

Sur la pointe, la piste quitte la falaise et rejoint une prairie d’herbe. En contrebas, les vagues se heurtent sur une grande arche de roche. Nous trouvons un coin pour la voiture et poursuivons quelques kilomètres à pied. Le petit phare orange de Svalvogar nous attendait. Le soir, nous nous endormons au son de la mer déchaînée.

La route 622 n’est pas populaire auprès des touristes. Probablement dus à son facteur risque important, nous ne pourrons que vous recommander de vous y rendre avec prudence ! Mais avec du bon sens et un matériel adapté, c’est une route particulièrement spectaculaire, unique au monde.

Jour 3

— Cascade de Dynjandi, Garðar BA 64 et source d'eau chaude

Un air de solitude

Demi-tour sur la route 622, car la seconde section de la piste n’est pas adaptée à notre petite voiture. Notre rencontre avec le renard polaire de la veille nous trotte encore dans la tête. Nous avançons donc lentement sur la piste afin que je puisse scruter le moindre rocher. Malheureusement, la chance a tourné, mais nous apercevons quand même la silhouette de deux individus sur la crête. L’ombre noire de leurs museaux fins et de leurs oreilles pointues se détache dans le ciel.

La voie 622 est encore un ravissement pour nos yeux. Durant la nuit, quelques flocons ont blanchi les alentours. Du haut de la falaise, on aperçoit d’immenses cercles d’aciers qui flottent sur l’eau: ce sont les piscicoles. Quelques bateaux matinaux font des aller-retour entre la ferme et le village de Þingeyri. En arrière-plan, les colosses de roches aux têtes blanches sont encore endormis. Nous sommes spectateurs de cette scène ordinaire qui, dans nos yeux de voyageurs, prend des airs de féérie.

De retour à Þingeyri, nous tentons de passer par le col de la 626. Avec ces 700 mètres d’altitude et les chutes de neige de la nuit, c’est impossible. Dommage, car ce passage par le village de Grelutoftir semblait très joli ! Nous rebroussons donc le chemin et rattrapons l’itinéraire 60, en direction de l’une des plus belles cascades d’Islande, Fjallfoss.

Fjallfoss — la cascade des montagnes

L’accès jusqu’à la chute de Fjallfoss est rapide. Nous empruntons un petit chemin aménagé qui serpente entre d’autres cascades. Un peu plus haut, les parterres de planches laissent place aux rochers humide (logique !). Il est toujours regrettable de croiser des personnes en petites tennis crapahuter sur ces pierres glissantes … Le sentier de plus en plus escarpé débouche ensuite sur un replat. Nous nous retrouvons face à face avec Fjallfoss. Avec ces 100 mètres de haut et 60 mètres de large, la cascade de Dynjandi (l’autre nom de Fjallfoss) est tout simplement spectaculaire. En plein mois de septembre, son débit était particulièrement important ce qui amplifie cette impression de “mur l’eau”. Définitivement, l’hiver islandais arrive. Autour de nous, la végétation s’est teintée d’orange, de rouge et d’ocre.

Garðar BA 64 — la plus ancienne épave de l'ile

Midi passé, nous reprenons la route et traversons l’Arnarfjörður pour rejoindre le prochain fjord. Après un passage à Patreksfjörður, nous faisons un arrêt au Garðar BA 64. Il s’agit de la plus ancienne épave en acier échouée sur l’île. Si nous n’avons aucune appétence pour ces baleiniers, il est toujours intéressant de se rendre compte de la taille de ses monstres de fer. Mit à flot en 1912, le Garðar BA 64 s’est échoué dans la vallée de Skápadalur 69 ans plus tard. Qu’on les apprécie ou non, les ruines industriels sont partie intégrante du paysages islandais

Latrabjarg — la falaise aux oiseaux

Après la baleine, le renard polaire et le phoque, un petit oiseau manquait à notre utopie nordique: le macareux. Les falaises de Latrabjarg, à l’extrême ouest du fjord, abritent des millions d’individus. C’est un lieu d’observation de prédilection pour tous les ornithologues. Attention, le macareux moine niche sur les falaises de mai à fin-août. Tentés par cette expérience, nous nous aventurons sur la route 612, traversons de la magnifique baie d’Örlygshöfn et atteignons le village de Breiðavík. Impossible d’aller plus loin avec notre véhicule. Les tranchées de boue sur la piste empêchent les vans et citadines d’y circuler. Nous décidons de nous dégourdir les jambes sur la grande plage de Breiðavík. Le sable fin et blanc et les falaises environnantes donnent un petit air de Bretagne à ce pays. Nous passons un moment à sauter les guets pour rejoindre la mer.

Circuler jusqu’aux falaises de Latrabjar

Pour parcourir cette route 612, nous vous conseillons de rouler avec un 4×4. À partir de Breiðavík, la route est très cahoteuse et difficile d’accès pour les châssis bas. Sans doute qu’en début de saison celle-ci est plus praticable. Mais si comme nous, vous passez fin septembre, prévoyez un véhicule surélevé. 

Bain thermale de Krosslaug et son coucher de soleil sur la baie de Birkimelur

Le crépuscule pointe son nez quand nous repartons sur la route 62. L’atmosphère rosie par le soleil couchant rend la baie de Birkimelur, particulièrement éblouissante. Nous décidons de nous arrêter dans la piscine géothermique de Krosslaug. Nous n’avions pas encore testé de bains thermaux, car rebutés par le monde et le prix. À cette heure tardive et au bout du monde, nous avons plongé dans le bassin à remous. Seuls et face à l’océan, nous nous sommes prélassés durant une bonne heure et avons accompagné l’assoupissement du soleil. Le plus difficile fut d’extraire nos carcasses de cette eau à 35°C.

Une petite boîte se trouve près des vestiaires et permet de laisser les 1000 ISK pour l’utilisation du bain. La plupart des piscines géothermiques sont en libre accès hors-saison. C’est donc à la bienveillance de chacun de payer l’entretien de ces bains. Nous remontons rapidement en voiture et trouvons un coin tranquille non loin de là pour la nuit. La peau douce comme celle d’un bébé, nous nous pelotons et reprenons des forces pour notre dernière journée en Islande.

Jour 4

— Péninsule de Snaefellsnes

Un lever aux aurores ! Pour notre dernier jour en Islande, nous décidons de nous aventurer autour de la péninsule de Snæfellsnes, à l’ouest de l’Islande. C’est l’une des destinations phares du tourisme de l’île, car ces 80 km de terres sont un concentré de merveilles naturelles. Glacier, volcan, cratère, il y en a pour tous les goûts.

Derniers instants de solitude

Nous partons donc à l’aube, toujours sur la 60 qui serpente entre les fjords. L’itinéraire, qui longe la côte, est particulièrement paisible le matin. La brume matinale, teintée des premiers rayons du soleil, emplit le paysage d’une douceur que l’on ne voit nulle part ailleurs. Nous traversons Kollafjörður et sa jolie vallée brunie par l’automne. Depuis cette section du Westfjord, on aperçoit la multitude de petites îles qui bordent la côte de la péninsule de Snaefellsne.

Nous quittons la 60 pour rejoindre l’axe principal de la péninsule, la 55. Le trafic se densifie un peu (à l’échelle de l’Islande) et nous renonçons une fois pour toute à notre solitude. Cela ne nous empêche pas de dévorer des yeux les hautes montagnes environnantes. Sur le flanc des falaises, la route de gravier tassée se dessine en virages et succession de pentes.

Kolgrafafjörður — le pont en forme d'épée

Ce terrain que nous avions parcouru tranquillement durant ces derniers jours devient rapidement plus dangereux lorsque l’inattention humaine rentre en jeu. En effet, il n’est pas rare de voir des camping-cars ou des voitures s’arrêter en plein milieu de la route pour prendre une photo. Soyons intelligents et prudents ! Nous sommes des animaux très prévisibles et nos amis islandais ont aménagé de petits parkings aux plus beaux points de vue.
C’est le cas pour notre premier arrêt de cette matinée. 65° 2′ 36.6223″ N 22° 30′ 57.3181″ W

De là-haut, le panorama est époustouflant. Une épave de bateaux, des îlots par centaine et une mer azur, il n’en fallait pas moins pour ravir nos yeux. La 54 se poursuit jusqu’au fameux Kolgrafafjörður “le pont en forme d’épée” ! Au ras de l’eau, cette bande de goudrons traverse le bras de mer d’un bout à l’autre. Pour être tout à fait honnêtes, nous n’avions pas eu cette information lors de notre voyage et elle est passée complètement inaperçue ! Seule la horde de voitures et de drones nous ont mis la puce à l’oreille …

Kirkjufell — l'emblématique montagne église de l'Islande

Probablement, la montagne emblématique de Snæfellsnes, si ce n’est de l’Islande. Situé juste à côté de Grundarfjördur, Kirkjufell est une formation rocheuse de 463 mètres dont l’aspect pyramidal a inspiré son nom (signifie “la montagne église” en islandais). Ce mastodonte est bien souvent associé à la cascade Kirkjufellsfoss qui se trouve juste à côté. Ensemble, il forme un duo de choc bien connu des touristes ! (Ne vous y méprenez pas, nous aussi nous l’avons fait cette photo !).

Avant de nous aventurer jusqu’à Grundarfjördur, nous avons bifurqué sur la 576 et atteignons une petite presqu’île juste en face de Kirkjufell. Nous nous sommes garés près de la ferme de Spjör. De là-bas, Kirkjufell se démarque de ces congénères et semble émerger de la mer. Elle y flotte. Mais le panorama ne se cantonne pas à ce monument. Le soleil qui jouait avec les nuages illumine tout à coup la vallée de Grundarfoss. Quelle beauté ! Nous sommes restés de longues minutes à déguster ce moment de solitude.

Nous nous sommes ensuite rendus à Kirkjufellsfoss (la cascade), pour voir ce que ce lieu avait de si emblématique. Il est vrai qu’au pied de la montagne, celle-ci est particulièrement belle. La perspective de cette chute d’eau et de cette montagne rend n’importe quelle photo fabuleuse. Mais faut-il encore trouver un point de vue sans touristes ! Qu’importe, ce lieu est magnifique malgré sa proximité avec le grand axe routier.

Pour aller plus loin

Si vous avez l’occasion et que les conditions météorologiques le permettent, pourquoi ne pas tenter l’ascension de Kirkjufell. Si le temps ne nous avait pas manqué, nous aurions adoré faire cette randonnée de 3h (aller-retour) jusqu’à son sommet. Pour plus d’informations, n’hésitez pas à faire un tour sur le site Happy When Hiking !

Le phare d'Öndverðarnesviti à l'extrémité de la péninsule

Cap vers le point le plus à l’ouest de la péninsule: le phare de Öndverðarnesviti. Après 20 bonnes minutes d’un chemin cahoteux et crevassé, nous arrivons finalement jusqu’à un petit parking. Öndverðarnesviti se trouve à quelques mètres. Construit en 1973, ce petit phare orange est typique de ce que l’on peut voir sur les côtés islandaises. Outre son point de vue exceptionnel sur la mer et la péninsule de Snæfellsnes, il est entouré par de nombreuses ruines d’habitations et de maisons de pêcheurs, datant du XIIIe siècle. Déambuler entre ces traces historiques et ces hautes herbes vertes, donne un caractère particulier à ce lieu. De petits panneaux explicatifs permettent d’en apprendre davantage sur l’histoire de ce site d’exception.

La position géographique d’Öndverðarnesviti, à l’extrême ouest de l’île, rend cette zone particulièrement venteuse. Avec des rafales à 100 km/h, les bourrasques qui venaient secouer la mer ont étouffé nos rires. Car loin de l’hostilité du désert que nous avions traversée la semaine passée, ce déchainement de vagues réveille en nous des émotions infantiles. Courir la gueule grande ouverte, sauter dans le vent et s’amuser de nos tignasses emmêlées ….

Les autres perles de la pointe ouest

Nous ne pouvons parler de la pointe ouest de Snæfellsnes sans aborder de ses autres trésors. Sur la route 612 qui mène à Öndverðarnesviti se trouve la très belle plage de Skarðsvík. Contrairement à beaucoup d’autres en Islande qui sont recouvertes d’un sable de lave noir, celle-ci est intégralement dorée. Cette couleur qui contraste avec la roche basaltique très sombre et lui donne un caractère particulier. Un peu plus loin, la route se sépare en deux. Pour vous rendre à Öndverðarnesviti, tourner à droite. Mais si l’envie vous prend, bifurquer à droite vers le phare de Svörtuloft. Plus connu et plus grand que son camarade de côté, ce phare de presque 13 mètres de haut fut construit en 1931. En plus de sa vue imprenable (et photogénique) sur la mer, ce lieu est également un repère pour de nombreuses espèces d’oiseaux.

Du cratère de Saxhóll au village d'Hellnar

Le temps nous manque et nous devons déjà repartir. À contrecœur, nous renoncerons à passer par le cratère de Saxhóll, malgré notre envie. Si nous en avez l’occasion, c’est une étape importante de ce périple dans l’ouest de l’Islande, notamment si nous n’êtes pas passé par le cratère de Grabrok (Grábrók). Le super blog Voyage Hors Saison vous détaille tout. Nous roulons maintenant sur la côte sud de Snæfellsnes et prenons la direction d’Hellnar. Après quelques kilomètres, nous bifurquons vers les falaises et apercevons la toiture écarlate de la petite église du village. Planter dans une prairie verdoyante avec pour fond la mer, elle resplendit. Un peu plus loin, au centre du village se trouve un parking, où nous laissons notre voiture. Nous rejoignons ensuite un petit sentier qui nous mène jusqu’à une plage de galets. Polis peu à peu par les flots, ces derniers sont impressionnants par la diversité de leurs tailles. Pour compléter ce tableau, une impressionnante grotte taillée dans la falaise forme une grande arche de sédiments. Les vagues viennent s’y fracasser et créent un bouillon d’écume.

Le canyon de Rauðfeldsgjá

De retour en voiture, nous continuons notre route sur l’axe 55 en direction de l’Est. Très vite, nous apercevons une immense faille qui tranche la montagne de haut en bas. Cette cicatrise est d’autant plus impressionnante, quelle est entourée d’un écrin verdoyant qui contraste avec la noirceur de la pierre. De l’eau semble y couler. Ni une ni deux, nous nous arrêtons sur un parking en contrebas de la falaise. Un petit sentier nous conduit jusqu’à l’embouchure du canyon de Rauðfeldsgjá. De l’eau s’en échappe, mais le chemin semble se poursuivre à l’intérieur. Nous nous y aventurons un petit plus profondément, en sautillant de pierre en pierre. Le débit de l’eau est très faible, mais un panneau nous alerte des précautions à prendre avant de s’introduire dans la faille. La galerie est impressionnante de beauté. Les immenses parois de roches sombres sont illuminées par les rares rayons de soleil qui s’introduisent dans la gorge. Par endroit, une végétation humide et dense recouvre les murs. Seul le bruit de l’eau vient perturber ce silence.

Pour aller plus loin

Après nous être davantage renseignés, nous avons appris que le sentier se poursuit sur plusieurs kilomètres pour atteindre la source du canyon, une impressionnante cascade. Ce parcours doit être fantastique mais des vêtements imperméables (chaussures comprises) sont indispensables. Encore une chose à laquelle nous devons renoncer pour le moment.

Clôture et bilan de ces 4 jours dans les Westfjords

Il est maintenant temps de rejoindre l’aéroport de Keflavik. Nous quittons la péninsule de Snæfellsnes et avec elle l’Islande sauvage et brute que nous étions venus chercher deux semaines plus tôt. Ce road trip improvisé de 4 jours sur la côte ouest de l’Islande ne nous a pas déçus ! Au contraire, nous sommes allés de surprise en surprise, malgré notre organisation de dernière minute. Bien que nous avions pioché çà et là quelques conseils auprès de nos confrères blogeurs, nous nous sommes laissé guider par la route. Et quel bonheur ! Très honnêtement, nous aurions aimé passer un jour de plus sur la péninsule de Snæfellsnes. Nous avons eu l’impression de rater beaucoup d’endroits fabuleux ou du moins de ne pas pouvoir en profiter pleinement.

Le mot de la fin

« J’ai eu une nette préférence pour l’extrême nord des Westfjords. Ses paysages bruts et sauvages m’ont bouleversée. Malgré le temps passé sur la route, j’ai adoré serpenter dans ces fjords, osciller de la mer à la montagne. Ce sont des paysages que l’on ne peut voir nuls par ailleurs et qui sont encore très préservés malgré la croissance du tourisme en Islande. Il est toujours difficile d’élire son coup de cœur, mais je crois que la route 643 restera une claque esthétique. »

– Léna

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3 Responses

  1. Super votre article ! On a adoré la La Péninsule de Snaefellsnes. Malheureusment la météo nous a empêcher de monter dans la région au Nord ouest de l’Islande.

    1. Merci beaucoup pour ton retour ! On est contents que l’article est pu t’aider pour ton voyage. J’espère que tu auras (peut-être) l’occasion de découvrir le circuit du Nord une prochaine fois 🙂

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